Détails de la question :
Nous versons une pension alimentaire à la fille de mon conjoint de 110 euros par mois (saisie sur salaire depuis 17 ans), elle a bientôt 20 ans, travaille depuis 1 an, mais ayant un contrat de 110 h par mois, elle nous disait qu’elle ne pouvait pas subvenir seule à ses besoins. Elle vit seule dans son appartement.
Cette année au 1er novembre, comme indiqué dans la décision de justice, nous lui avons demandé par huissier de Justice les justificatifs.
Elle ne nous a fourni que des documents illusoires, donc nous lui avons envoyé un recommandé avec les documents dont nous avions vraiment besoin : salaire complet, prime d’activité etc. mais pas de réponse.
Nous pensons qu’elle a suffisamment pour vivre. De plus qu’elle a un contrat CDD de 35h, mais veut un CDI pour arrêter le versement de la pension alimentaire. Est-elle vraiment dans ses droits ? Est-il possible de récupérer des pensions alimentaires versées qui ne sont pas justifiées ? (depuis juillet nous demandons l’arrêt de la pension par huissier mais elle ne veut pas arrêter la saisie sur salaire).
Merci de votre réponse.
La réponse :
I- La pension alimentaire
La pension alimentaire est une « somme d’argent versée périodiquement pour faire vivre une personne dans le besoin, en exécution d’une obligation alimentaire, du devoir de secours ou d’une obligation d’entretien ».
Elle naît en principe au jour de la demande en justice.
Ainsi, chacun des parents doit contribuer à « l’entretien, à l’éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant » (Art.371-2 Al. 1 Code civil).
- Cf modalités et conditions relatives au versement de la pension alimentaire : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F991
II- La durée de la pension alimentaire
Il est à noter que « cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l’enfant est majeur » (Art. 371-2 Al. 2 Code civil).
Le versement de celle-ci se poursuit jusqu’à l’acquisition par l’enfant d’une autonomie financière qui se caractérise par « l’absence d’état de besoin de l’enfant justifiant que l’obligation de contribution soit désormais devenue sans objet ».
Il n’existe aucune limite d’âge ni aucune disposition légale précise puisque le maintien de la pension alimentaire va dépendre de la situation personnelle et financière de l’enfant majeur. À titre d’exemple, il peut s’agir des résultats scolaires, de l’état de santé, d’un emploi rémunéré, des efforts mis en œuvre pour subvenir à ses besoins. Ces considérations sont laissées à la libre appréciation du juge qui appréciera au cas par cas.
III- La révision et la suppression de la pension alimentaire
Une pension alimentaire peut toujours être modifiée lorsqu’il existe des éléments nouveaux notamment sur la situation financière du débiteur ou du créancier.
La suppression ou la révision de la pension alimentaire peut être demandée devant le juge aux affaires familiales.
Ainsi, lorsque le débiteur de l’obligation parvient à prouver que les enfants ne sont plus dans un état de besoin, les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain pour fixer la date à laquelle elle sera supprimée (Civ. 1ère, 19 déc. 2012, n° 11-21.249).
Dès lors, seule la décision du juge aux affaires familiales permet de déterminer la suppression, la suspension ou la modification de la pension alimentaire.
- CF formulaire de demande au juge aux affaires familiales : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F21023
IV- L’indépendance financière de l’enfant majeur
A- La charge de la preuve de l’indépendance financière
Aux termes de l’art. 1353 du Code civil, « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation ».
Ainsi, le débiteur d’une pension alimentaire qui souhaite se libérer de son obligation doit prouver que ses enfants, une fois devenus majeurs sont indépendants financièrement.
Cela signifie d’une part que le débiteur de l’obligation doit démontrer que les enfants ont acquis une indépendance financière, d’autre part qu’ils ne se trouvent plus dans un état de besoin (Civ. 8 févr. 1989, n° 87-17.771).
Par conséquent, l’obligation alimentaire perdure tant que l’enfant ne peut pas subvenir à ses besoins en toute autonomie. Ce n’est ni le statut de l’enfant qui compte, ni même son âge mais sa capacité à s’assumer financièrement qui sera prise en compte par le juge aux affaires familiales pour déterminer si l’enfant devenu majeur doit encore bénéficier de la pension alimentaire.
B- Les moyens pouvant être mis en œuvre par le débiteur de l’obligation
Pour connaître la situation financière d’un débiteur ou d’un créancier d’aliment une mesure d’instruction est possible conformément à l’art. 145 du Code de procédure civile. En effet, le juge aux affaires familiales peut sur simple requête, ordonner la production de documents auprès de différents organismes tels que l’administration fiscale, une banque ou encore un employeur. Il peut également ordonner une injonction au débiteur de délivrer lui-même ces documents pour justifier de sa situation personnelle et financière.
- CF modèles de requêtes à adresser au juge aux affaires familiales : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/R15764
De plus, l’art. L111, II du Livre des procédures fiscales permet aux créanciers d’aliments ou aux débiteurs dès lors que « cette qualité est reconnue par une décision de justice de prendre connaissance du revenu imposable, de l’impôt payé et du nombre de parts du quotient familial du débiteur grâce à la consultation de différentes listes relatives à l’imposition de ce dernier ».
V- Le trop-perçu de la pension alimentaire
En cas de litige concernant la pension alimentaire, le juge aux affaires familiales doit être saisi.
- Cf : modalités de saisine du juge aux affaires familiales : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/R15764
Ainsi, lorsque le débiteur de l’obligation pense avoir versé à tort une pension alimentaire, celui-ci devra saisir le juge aux affaires familiales qui constatera ou non ce trop-perçu.
Dans l’affirmative, le débiteur de l’obligation muni d’un titre exécutoire peut dès lors mettre en demeure le créancier de l’obligation de s’exécuter afin de rembourser les sommes indûment perçues.
Le créancier de l’obligation (à savoir l’enfant en ce cas) devra restituer ces sommes aux termes de l’Art. 1302 du Code civil.
Si le créancier de l’obligation ne s’exécute pas, le débiteur peut saisir un huissier de Justice pour le recouvrement de sa créance.